17 mai 1997-17 mai 2022, cela fait exactement vingt-cinq ans depuis la fin du pouvoir de Joseph-Désiré Mobutu et l’arrivée au pouvoir de Laurent Désiré Kabila, en tête de l’Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo (AFDL). Anciennement célébrée comme fête de la libération en référence à l’entrée à Kinshasa de l’AFDL, cet anniversaire a été institué comme journée de la « Révolution et des Forces armées de la RDC ». En ce grand jour dédié à l’armée, Tembos Yotama, un élu de Butembo salue la mémoire des militaires « patriotes » qui sont dans les rangs des FARDC et qui combattent les rebelles, particulièrement dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri.
Tembos Yotama, le député national surnommé « combattant » pour sa lutte contre l’insécurité et les antivaleurs dans sa ville et sa province d’origine, est aujourd’hui dans une lutte sans merci contre les massacres de Beni et d’Irumu, attribués aux rebelles de l’ADF. Cette lutte l’a amené à rédiger, avec son propre frère de sang et aussi député provincial Mbenze Yotama, trois gros documents enrichis des investigations sur les tueries qui battent le plein dans la région Est de la RDC. Les trois grandes publications sont le « Rapport Yotama », l’ « Etat de siège et ses paradoxes au Nord-Kivu et en Ituri » ainsi que le « Rapport Yotama actualisé », documentant les massacres de Beni et Ituri et leurs statistiques.
« Parmi les personnes sauvagement tuées, il y a sans doute aussi des militaires, des épouses des militaires et leurs dépendants. Il faut leur rendre hommage, particulièrement ceux qui meurent en train de défendre l’intégrité territoriale, introduit Tembos Yotama.
Lui qui se bat bec et ongles contre les causes profondes des massacres de Beni a toujours dénoncé l’infiltration des forces armées de la République Démocratique du Congo, FARDC.
« Le 17 mai est aussi une date à laquelle le malheur est entré dans notre pays…comme qui dirait que c’est le début de l’infiltration d’autres nationalités dans notre armée. Jusqu’aujourd’hui, les conséquences sont nombreuses, mais c’est un fait accompli. Ce qui doit être fait, c’est purger l’armée et élaguer les infiltrés afin de ne conserver que des soldats de nationalité congolaise, des vrais patriotes. C’est aussi l’une des solutions dans la guerre de Beni », poursuit l’honorable combattant Tembos Yotama.
Par ailleurs, l’homme fort de Butembo pense que si les autorités jouent leur rôle de purger l’armée, la population doit continuer de jouer son rôle de collaborer avec l’armée en lui donnant des informations, en l’encourageant afin de bouter hors l’égorgeur qui extermine à petit feu les Nande ainsi que d’autres tribus.
« Les différents rapports que nous avions publiés, à savoir le « Rapport Yotama », l’ « Etat de siège et ses paradoxes au Nord-Kivu et en Ituri » ainsi que le « Rapport Yotama actualisé » ont démontré que les ¾ des victimes sont des Nande. Nous avons donc un rôle à jouer pour sortir d’affaire et c’est rester en veille, se prendre en charge et collaborer avec les services de sécurité. Sinon, nous allons disparaître au fil du temps », conscientise l’homme à la jaquette de couleur verte.
Un peu d’histoire
La prise de Kinshasa a eu lieu le 17 mai 1997 lors de la première guerre du Congo. Cet évènement marque la chute du régime de Mobutu Sese Seko et l’arrivée au pouvoir de Laurent-Désiré Kabila. Les rebelles de l’Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo se rendent maîtres de la ville sans combats contre les mobutistes.
Les 15 et 16 mai, la dernière résistance organisée de la DSP et de l’UNITA est brisée autour du pont sur la Nsele, face à 2 000 combattants rwando-congolais. Le camp de la DSP est investi par les rebelles tandis que 7 chars Type 62 de la 1re division blindée sont abandonnés sans combattre.
Le général Mahele, chef de l’armée zaïroise, sait que la guerre est perdue et cherche à éviter des combats sanglants dans la ville. Grâce à un téléphone satellitaire fourni par l’ambassadeur américain, il est en contact avec les rebelles depuis le 13 mai. Le 15 au soir, les généraux Mahele, Ilunga et Likulia (alors premier ministre) essayent de convaincre Mobutu de quitter la ville pour éviter un bain de sang. Peu après, les généraux — Bolozi, Nzimbi, Vungbo, Wezabo et Baramato —, mobutistes de l’ethnie Ngbandi et opposés à la reddition du régime, sont réunis autour de Mobutu qui annonce son intention de fuir à Gbadolite. Selon le journaliste François Soudan, les officiers ngbandi de la ville se retrouvent ensuite, sans Mobotu, et dressent une liste des 500 noms de traîtres parmi les Zaïrois.
Le 16 à 9 h 45, Mobutu s’envole dans son Boeing 727 pour Gbadolite, emportant plusieurs millions de dollars. Les dignitaires fuient pour la plupart dans la journée. Ainsi, le général Likulia est reçu à l’ambassade de France. Pour éviter les massacres, les Américains demandent à Kabila de leur laisser le temps de fuir. Seuls quelques généraux mobutistes restent dans la ville, comme Kongulu Mobutu, fils du président, qui continue à essayer de défendre la ville.
Le 16 au soir, Mahele essaye d’aller calmer les soldats de la DSP dont le chef, le général Nzimbi, a fui à Brazzaville. Pris à partie par les soldats, Mahele est mitraillé malgré l’intervention du général Wezago, adjoint de Nzimbi, et l’arrivée tardive du fils de Kongulu Mobutu.
Après l’assassinat de Mahele, la ville est livrée au pillage avant l’arrivée des rebelles. Les anciens soldats de Mobutu, sans chefs, sont les principaux acteurs de ces pillages
Le 17 mai 1997 au matin, les colonnes de l’AFDL, notamment le 101e bataillon de l’armée rwandaise, entrent dans la ville. Elles sont notamment guidées par les militants du Front patriotique, un parti politique de l’opposition de gauche zaïroise. « Précédées d’une réputation de discipline », les colonnes de combattants rebelles sont acclamées par la population.
Le capitaine Kongulu Mobutu est le dernier proche de Mobutu à quitter Kinshasa pour Brazzaville, après avoir vainement essayé d’organiser une résistance.
Les militaires zaïrois, sans chefs, se rendent pour la plupart pacifiquement. Ils empilent leurs armes et attendent leur enregistrement par l’AFDL. La DSP abandonne son camp de Tshatshi le 17 au soir, sans combattre. Les soldats qui refusent de rendre leurs armes, les anciens membres de la DSP et les fidèles du régime sont tués par les rebelles ou lynchés par la population. Les journalistes étrangers sont témoins de ces exécutions. L’estimation du nombre de tués dans les règlements de compte varie de 200 à 654 morts. La Croix-Rouge Zaïroise recensera 228 à 318 cadavres autour de la capitale dans les jours qui suivent. Plusieurs dizaines de soldats sont parqués dans les casernes, tandis que les mobutistes suspectés sont emmenés par milliers en prison. Les bâtiments des anciens mobutistes sont pillés par les Kinois.
Laurent-Désiré Kabila arrive le 20 mai 1997 à Kinshasa. Il instaure un régime présidentiel. Son gouvernement compte treize membres: une majorité d’anciens de l’AFDL, deux du Front patriotique et deux transfuges de l’UPDS (parti d’Étienne Tshisekedi, qui reste dans l’opposition).
Rédaction VERANDAMUTSANGA.ORG